C’est sûrement l’un des événements qui marquera la 20e édition de la conférence sur les rétrovirus qui a débuté dimanche 3 mars à Atlanta (Etats-Unis) : une enfant de deux ans et demi, contaminée à la naissance par le virus du sida n’en porte, aujourd’hui, plus aucune trace. Une histoire incroyable, unique au monde, mais qui demande de la prudence avant de prononcer le mot "guérison".

L'histoire débute à Baltimore il y a presque trois ans. Une femme originaire du Mississippi donne naissance à une fille. Les médecins découvrent alors que la mère était porteuse du virus VIH et qu’elle n’avait pas été soignée. Le risque d’avoir contaminé le bébé étant très élevé, plus de 30%, ils pratiquent des tests qui montrent une très forte suspicion de contamination.

Un traitement peu après la naissance

Une équipe de spécialistes de l’université Johns Hopkins de Baltimore est alors appelée à la rescousse pour s’occuper du bébé. Ces médecins décident de placer l’enfant dès sa trentième heure de vie sous un traitement à base de trois médicaments dits antirétroviraux, décision inhabituelle dans le cas d’un enfant, mais qui a pour but de combattre le virus le plus massivement possible.

Trois semaines après le début du traitement, le virus n’est plus détectable dans le sang de la fillette. Des tests répétés à de très nombreuses reprises montrent que le traitement est efficace. Mais les médecins vont perdre la trace de la fillette au bout de quelques mois et ne la revoir qu’à l’âge de vingt-trois mois. Ils apprennent à cette occasion qu’elle ne suit plus aucun traitement depuis qu’elle a un an et demi.

Les tests ne détectent aucune trace décelable du virus VIH

Mais, à leur grande surprise, les examens sanguins et tous les tests ultrasophistiqués qu’ils pratiquent montrent qu’il n’y a nulle trace décelable du virus VIH chez la fillette. Une situation qui perdure puisqu’ils revoient la fillette dix mois plus tard et toujours sans traitement. L’enfant, qui a actuellement trente-trois mois, ne montre aucune trace de la présence du virus.

Certains spécialistes restent sceptiques face à ce premier cas de "guérison" et avancent l’hypothèse que le bébé n’était peut-être pas infecté et que c’est une mauvaise interprétation des résultats qui a pu faire croire à une contamination.

Un cas de guérison "fonctionnelle"

Les spécialistes qui ont suivi l’enfant réfutent ardemment cette hypothèse et rappellent qu’ils ont multiplié les tests pour être sûrs de leur fait. Deborah Persaud, de l’université Johns Hopkins de Baltimore qui suit l’enfant, reste prudente et parle de "guérison fonctionnelle", un mot qui signifie que, certes, le virus n’est pas détectable, mais qu’il n’est peut-être pas complètement éliminé. Elle pense cependant que le traitement massif administré précocement a sans doute empêché le virus d’avoir le temps d’aller se cacher dans ce qu’on nomme des "réservoirs", des cellules abritées dans des ganglions où le virus "dort" en attendant de resurgir pour se multiplier.

L’équipe de Baltimore envisage maintenant d’évaluer cette stratégie de traitement massif sur d’autres enfants pour confirmer ce premier résultat plein d’espoir.